Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
"Une vie à elle"
18 octobre 2014

L’allaitement et la place du père

Ce serait peut-être plutôt à mon mari d’écrire ce billet – c’est une idée à creuser… Mais je vais quand même jeter quelques pistes. Je ne prétends pas faire le tour de ce sujet si important, mais je tenais à en parler de mon point de vue de mère. Il me semble que c’est un sujet d’inquiétude pour beaucoup de futures mamans, et de futurs papas, si j’en crois mon expérience et la fréquence des questions qu’on me pose. Et tous les livres et blogs que j’ai pu consulter soulèvent ce problème.

 

On lit souvent : que le papa ne fasse pas de fixette sur la question de l’allaitement, il trouvera sa place naturellement auprès de l’enfant. Ce qui s'avère vrai chez nous, mais pour mettre en confiance, c’est un peu court. Je voudrais essayer de creuser notre expérience, et la croiser avec celle de certaines amies, pour expliquer pourquoi chez nous, l’allaitement n’a pas privé Neo Papa d’une relation privilégiée à son fils. J’espère que ce récit pourra servir à d’autres : avec un peu de recul, je suis convaincue qu’il serait vraiment dommage de priver un enfant du lait de sa mère (si celle-ci souhaite allaiter) de crainte de marginaliser le père. L’équilibre se fait très bien de lui-même, si on envisage la place de l’enfant entre ses parents de façon globale.

  

Pour prendre le problème à bras le corps, je dirais : c'est vrai, l'allaitement est un moment privilégié entre la mère et l'enfant, que le père ne peut pas reproduire. Donner le biberon n'est pas un équivalent, car le pouvoir apaisant du sein, ce n'est pas que le lait qui coule. C'est aussi la chaleur de la mère, l'arrondi sur lequel s'endormir, l'odeur de sa peau. Et sans doute, par-dessus tout : l'alchimie entre le goût, l'odeur et le toucher. Le lait a la saveur qui va avec votre odeur. Voilà ce qui est inimitable, je crois. Cela veut dire que pour trouver le même type d'expérience avec son enfant, un père doit à mon avis moins chercher à le nourrir qu'à faire de son corps, à lui aussi, un refuge apaisant. J'y reviens.

 

Quand mon futur-mari et moi avons commencé à parler de parentalité, très tôt dans notre relation, il était clairement contre l’allaitement. Déjà papa poule dans l’esprit, il me disait que c’était « le nerf de la guerre » dans le rééquilibrage des relations père-mère-enfant. En entendant ce discours, je me suis dit qu’il fallait voir le bon côté des choses : j’étais tombée sur un homme qui voulait s’investir. Mais j’ai aussi un peu paniqué, parce que pour moi allaiter était une évidence et que je n’étais pas prête à faire une croix dessus. J’ai remis la conversation à plus tard et réfléchis au problème. Quand nous sommes revenus sur la question, j’avais musclé mon argumentaire pro-allaitement, et surtout trouvé un compromis : il pourrait donner des biberons de lait maternel que j’aurais tirés au préalable. Cette proposition a été un tournant décisif dans notre parcours vers la vie de parents.

 

Lui aussi s’est documenté, et s’est laissé convaincre par les arguments « santé ». N’ayant pas été allaité, il a passé tous les hivers de son enfance chez le pédiatre et sous médicaments, a toujours un terrain allergique, et a eu des gros problèmes de surpoids au début de l’adolescence. Autant de désagréments que l’allaitement peut aider à prévenir. (Évidemment je ne dis pas que si sa mère l’avait allaité il n’aurait rien eu de tout cela, mais cela aurait sans doute pu aider). Bref, quand nous avons décidé de faire un enfant, nous étions d’accord pour l’allaitement, avec option biberons de lait maternel.

 

Pendant la préparation à l’accouchement, j’ai eu la surprise d’apprendre que ma solution n’allait pas si bien fonctionner que je le croyais. Les sages-femmes consultées recommandaient d’attendre au minimum 4 semaines, et de préférence 6, avant d’introduire des biberons, de peur que la succion du bébé ne soit perturbée. J’ai annoncé cela à Neo Papa avec quelques craintes ; il a encaissé mais était un peu déçu.

 

Et puis Zorro bébé est arrivé. J’ai eu de la chance, mon allaitement s’est mis en route sans aucun nuage. Bébé, un peu secoué par sa naissance difficile, avait beaucoup besoin d’être rassuré, et demandait beaucoup le sein. Une petite bulle de douceur s’est créée autour des tétées, et j’ai eu la très bonne surprise de voir que mon mari partageait cette joie avec notre fils et moi. Il me disait sans cesse combien il était heureux pour lui de le voir se détendre sur mon sein, et quel bien cela lui faisait, à lui père, de voir son fils serein. Je pense que cela a aussi réveillé le souvenir d’une relation à sa propre mère plus compliquée, et qu’il était soulagé de savoir que son fils n’était pas parti pour rencontrer les mêmes difficultés.

 

J’ai tenu ma promesse aussi vite que possible et, pour la fête des pères, soit 4 semaines après la naissance de bébé, un biberon attendait Neo papa. Il l’a donné avec plaisir. Nous aurions dû continuer comme cela, mais les choses n’ont pas été si simples. Il s’est avéré que, mis à part le premier biberon qui était bien passé, les suivants ont donné à bébé des coliques spectaculaires. (Il a eu des coliques en dehors des biberons, mais certaines fois il y avait un lien très clair : il avait mal en fin de tétée, et se mettait à hurler dans le quart d’heure suivant la fin du bib). Nous avons essayé plusieurs biberons anti-coliques, mais rien n’y a fait. Je me souviens d’une fois où notre fils se tordait de douleur depuis deux heures, et où mon mari m’a dit, entre deux hurlements : « On ne m’y reprendra plus à donner des biberons ! ». De fait sa souffrance faisait peine à voir : nous avons décidé un moratoire sur les biberons jusqu’aux trois mois de bébé, âge où en théorie le système digestif est plus mûr et où les coliques peuvent disparaître. Quand il a eu plus de trois mois, et en prévision de l’entrée en crèche, nous avons refait des essais, et constaté avec soulagement que ouf, tout se passait bien.

 

Sauf que : mon mari a été le premier à me dire qu’il trouvait cela dommage. Il me disait qu’il voyait bien que le biberon, c’était pour notre fils de la nourriture, alors que le sein, c’était en plus un câlin. Un gros câlin qui réchauffait jusqu’au cœur du papa. Quand notre fils va mal et que mon sein le calme, il me dit sans cesse : « Comme je suis content pour lui ». Et c’est vrai que c’est assez magique… De ce fait, les biberons ne servent plus chez nous que quand je m’absente : pour la crèche, ou pour les soirées où je rentre tard du travail. Neo Papa me dit ne plus avoir de plaisir particulier à donner le biberon ; en tout cas, il en a moins que quand il joue avec bébé, ou qu’il lui donne le bain.

 

Récemment, je m’épuisais tard le soir sur mon tire-lait pour préparer le biberon du lendemain pour la crèche, et je disais tout haut : « Je me complique peut-être un peu la vie, quand même ». Réaction immédiate à ma droite : « Ma chérie, je te soutiens à 100%. À 120% même. Je trouve que c’est génial pour bébé, ce que tu fais ». Je lui suis tombée dans les bras : je peux vous dire que cela m’a fait plaisir.

 

Voilà pour dire que chez nous, Papa a trouvé sa place indépendamment de la fonction nourricière – qui est importante, certes, mais un bébé a d’autres besoins dans lequel un père peut s’investir.

 

Je termine par quelques idées plus « pratiques » :

-       On dit souvent que le papa peut être celui qui donne le bain – autre moment privilégié avec le bébé. C’est à mon avis une excellente idée, qu’on peut prolonger par le massage. Je n’ai pas encore fait d’atelier de massage de bébé (c’est pour novembre !) et mon mari n’a pas prévu d’en faire, mais je compte bien le former. Je pense que ça peut être un moyen excellent de développer la relation père-enfant, en retrouvant le côté tactile d’un allaitement. Car c’est sans doute plus cette proximité qui manque aux pères, que la fonction nourricière en tant que telle.

-       Une de mes amies, M., avait mis un truc en place avec son mari. Leur fils dormait dans leur chambre, dans un berceau à côté du papa. Quand il avait faim, c’était le papa qui le prenait et le donnait à la mère. Après la tétée, c’était le papa qui le recouchait. Et mon amie me disait : « Dès qu’il sent les mains de son père, il arrête de pleurer ». Je trouve l’idée excellente, même si nous ne l’avons pas reprise (mon mari a le sommeil si lourd que j’aurais eu le temps de faire quatre fois le tour du lit avant qu’il ne me passe fiston…). Elle permet d'associer père et mère dans une démarche commune d'attention, qui amène l'enfant au sein.

-       Et pour finir, je vous cite textuellement deux idées de mon amie Clara (dont c'est l'anniversaire aujourd'hui : un p'tit beurre Clara !) :

Faire participer les pères à l'allaitement dans le quotidien, idées #1 et #2 :

- avant la tétée, compter sur son égard extérieur pour vérifier le positionnement du bébé et la bonne prise du sein, éléments essentiels pour que le bébé prenne bien le lait et pour éviter les crevasses ;

- après la tétée, le père peut assurer une présence rassurante et un contact haptonomique (main posée sur le torse ou le ventre du bébé ou contact en peau à peau) pour une digestion apaisée (oui, même les bébés allaités ont mal au bide dans la première phase de digestion ) Cette présence est d'autant plus importante si le bébé reste éveillé après la tétée : moment privilégié "yeux dans les yeux" assuré !

  

Je pense que dans tous ces conseils (sauf le 1 de Clara), le socle est le même : développer le contact rassurant entre le père et son bébé. Cela ne peut faire que du bien, à tout le monde, y compris à l’allaitement qui n’en sera que plus serein. 

 

 Enfin, pour les papas qui souhaitent investir la fonction nourricière : dites-vous qu'en plus des biberons, il y aura très vite les purées. On conseille désormais de commencer la diversification alimentaire entre 4 et 6 mois. 4 mois, cela vient très vite, et père et mère sont égaux devant la petite cuillère (et l'effet éruption volcanique qui va avec). J'espère que les pistes lancées ici permettront aux papas nourriciers-dans-l'âme de tenir jusque là.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
N
Lu et approuvé par Néo Papa.
"Une vie à elle"
Publicité
Archives
Newsletter
Publicité