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"Une vie à elle"
2 août 2014

Finalement, cododo

Avant d’être enceinte, je ne connaissais rien à l’univers des bébés, de la petite enfance, de la puériculture… Rien de rien. Je suis fille unique et n’ai pas pu me faire une idée au travers de neveux ou nièces ; mes cousines habitent trop loin pour pouvoir me faire partager leurs expériences ; et je suis l’une des premières de mon groupe d’amies à devenir mère. Autant dire qu’avant d’être enceinte, je n’avais sur la parentalité que des idées vagues, héritées des choix éducatifs de mes parents. Enceinte, j’ai essayé de me briefer en accéléré, et me suis fait quelques grandes idées sur les sujets principaux.

Quand mon fils est né, beaucoup de choses ont volé en éclats. Passant de la théorie à la pratique, j’ai bien souvent révisé mon avis ou regretté de ne pas m’être penchée plutôt sur certains sujets. C’est l’une des raisons d’être de ce blog : j’imagine que beaucoup de (futures) jeunes mamans se sentent, comme moi, isolée, et partager ses expériences, cela donne toujours des pistes…

 

La question du sommeil de l’enfant est l’un des exemples de revirements les plus importants de ma vie de jeune mère. Pour moi, un enfant, cela dormait ; facile. Héhé, belle erreur d’ignorante ! Un bébé dort quand il se sent en sécurité. C’est là que les choses se corsent… du moins, si on attaque la question du sommeil d’un certain angle (car la solution peut être simple).

 

Pour prendre les choses chronologiquement : enceinte, j’avais donc acheté un berceau en osier à poser sur un support juste à côté du lit parental ; et nous avions reçu de ma mère un lit à barreaux, pour la suite des opérations. Mon idée était d’avoir bébé à portée de main pour l’allaiter dans un premier temps, puis d’installer le couffin dans le lit pour l’habituer à sa chambre, et finalement, de l’installer dans son lit. J’étais donc partie pour du room-sharing (comme disent les anglais), le temps de l’allaitement. Le terme cododo est vague : « cododoter », en français, c’est partager sa chambre ou son lit avec son bébé. Les deux expériences sont bien différentes !

 

À la maternité des Bluets, on m’a conseillé de prendre mon fils dans mon lit (donc de faire un bed-sharing), et on a précisé (une puéricultrice, je crois) que ce serait trop cruel de le laisser tout seul dans un berceau, aussi petit. Je ne me suis pas fait prier : d’abord parce que laisser mon nouveau-né dans son berceau en plastique, alors qu’il était encore au chaud dans mon ventre une poignée d’heures plus tôt, cela me semblait absurde ; et ensuite parce qu’il a eu une naissance difficile. Je me disais que, à plus forte raison, il avait besoin de moi, de ma présence, pour se remettre de cette épreuve. Pour être encore plus précise : la première nuit, il était inconsolable. Il hurlait – je ne sais pas si c’était de douleur, ou de terreur, ou les deux. La seule chose qui le calmait était que je marche en le portant. Je garde un souvenir ému de cette nuit passée à faire des tours d’étages dans les couloirs de la maternité, pour qu’il puisse s’assoupir. Dès que je m’asseyais, il se réveillait. C’est, paradoxalement, un excellent souvenir : je me suis sentie devenir mère… Bref, le lendemain soir, quand il s’est endormi du sommeil du juste dans mes bras, j’ai savouré mon plaisir : après deux nuits blanches (la première ayant été consacrée à le mettre au monde), ce fut un délice de s’endormir au son de son souffle paisible. Une première expérience de cododo idyllique.

 

J’ai continué le bed-sharing pendant le reste de mon séjour à la maternité (« on ne change pas une équipe qui gagne »…). La veille de la sortie, entretien avec une puéricultrice, que je nommerai La-Très-Prudente, qui nous a dit : « Pas de cododo avec deux adultes, c’est trop dangereux ». Et nous l’avons regardée en bons élèves que nous sommes : « Ah oui ? ah non ! Ben alors non, bien entendu ».

 

… Et nous nous sommes trouvé forts dépourvus lorsque la première nuit à la maison fut venue. Pleins de bonnes intentions, nous avons donc installé bébé dans son joli couffin, avec un nid d’ange fait de mes blanches mains, juste à côté de moi. Hurlements. Nous nous sommes regardés comme deux idiots, qui pensaient que cela allait être facile, et qui constatent leur méprise… Pour des raisons que je passe, il était à l’époque crucial que mon mari dorme bien. Nous étions par ailleurs tout à fait opposés à l’idée de laisser pleurer notre bébé, a fortiori, de cinq jours. Bébé a donc réintégré fissa sa place légitime, mes bras, et mon mari est allé dormi sur le canapé (la Voix résonnait dans nos têtes : « pas deux adultes… »).

 

Le lendemain matin, je suis passée à l’action : pas question que mon mari parte en exil sur le canapé pour une durée indéterminée. J’ai appelé à l’aide l’une de mes amies déjà maman et calée sur les questions de parentalité dite « proximale ». Elle m’a renvoyée (mille mercis C. !!) vers la brochure de l’Unicef UK sur le cododo – brochure très bien faite, je la recommande à mon tour ! À partir de là je me suis documentée, et j’ai découvert l’étendue du débat. Une chose en ressortait clairement : en France nous sommes globalement plutôt contre, mais dans d’autres pays c’est une norme. Il y avait donc un choix à faire, mais pas de raison particulière de culpabiliser. J’ai donc fait taire la Voix, convaincu mon mari, et le soir même, nous dormions tous les trois avec délice dans le même lit. Notre choix a été conforté par une autre sage-femme à qui j’ai soumis notre cas. Comme elle n’avait pas l’air de voir ce qui nous posait problème, je lui ai expliqué le conseil de La-Très-Prudente. Elle m’a répondu : « Je ne sais pas pourquoi on continue à dire cela aux parents ; aucun n’a jamais écrasé son bébé ». Son avis, et quelques lectures complémentaires, ont levé les derniers scrupules. Nous avons suivi la pente, qui nous semblait naturelle, du bed-sharing. Cela dure toujours actuellement, même si en début de nuit, nous plaçons bébé endormi dans un petit lit d’appoint (pour commencer à l’habituer doucement).

 

Je suis devenue une maman pro-cododo. Je pense qu’avoir son nourrisson dans sa chambre est une nécessité ; dans son lit, ou dans un berceau de cododo accolé au lit, c’est le top. Pour nous c’est devenu une évidence : nous sommes tous les trois parfaitement reposés, et n’avons jamais souffert du manque de sommeil. Tout le monde nous demande tout le temps, avec l’accent de l’angoisse dans la voix : « Ca va ? Pas trop crevés ? » ; et nous répondons le plus sincèrement du monde que nous sommes parfaitement reposés. C’est loin d’être un détail : s’occuper d’un bébé demande beaucoup d’énergie, et je ne sais pas comment on fait quand on enchaîne les nuits entrecoupées ! Je comprends qu’on puisse avoir des réticences vis-à-vis du cododo (j’en avais moi-même, avant bébé !), mais maintenant, cela relève pour moi de la grande devise Shadocks : « Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? ».

 

D’autre part, pour l’allaitement, cela me paraît crucial : j’avais mon fils juste à côté de moi, je n’avais qu’à le mettre au sein quand je le sentais remuer, et me rendormir dans la plénitude de sa satisfaction. Dans ces conditions, endormir bébé devient un jeu d’enfant. Il se sent en sécurité et se laisse aller au sommeil sans problème. Et enfin, last but not least : je suis désormais convaincue que c’est de cela qu’il a besoin. De la chaleur de ses parents, de leurs odeurs, de leur contact. Pourquoi lui refuser ce bien être, ces moments rassurants et pleins de tendresse ? De quoi a-t-il plus besoin que de se sentir rassuré et aimé ?

 

Un point (rapide) sur les questions de sécurité :

-       Le cododo cause-t-il ou empêche-t-il la mort subite du nourrisson ? La question est débattue, les études se contredisent. Les « pro » disent que le bébé fait moins d’apnées du sommeil parce qu’il apprend à « caler » sa respiration sur celle des parents ; et que les parents sont plus susceptibles de détecter des anomalies dans le comportement de leur bébé, même dans le sommeil. Les « anti » disent qu’on peut écraser son enfant. À la maison, nous avons choisi de faire dormir bébé au milieu du lit, isolé de son papa par un coussin d’allaitement. Je suis donc la seule « menace » pour lui, et je ne me suis jamais réveillée avec ne serait-ce qu’un coude pointé dans sa direction. J’ai conscience de sa présence en dormant.

-       Il ne faut pas faire n’importe quoi : pas de bed-sharing quand on a bu, pris de la drogue, ou qu’on est anormalement fatigué.

-       Traquer tous les endroits où bébé pourrait se coincer (entre le lit et le mur, entre le matelas et le bois de lit…) et avoir un matelas ferme.

-       Avant de commencer : bien revoir toutes les consignes de sécurité sur un site dédié (je fais ici seulement un rappel succinct).

 

Pour aller plus loin : Claude-Suzanne Didierjean-Jouveau, Partager le sommeil de son enfant, 2005, Éditions Jouvence, 93 pages, 4,95 euros.

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